En ce début de XXIe siècle interviennent de nombreux événements, hors normes, de nature industrielle, climatique ou sanitaire. Ils bousculent nos certitudes et nos modèles de prévision. Dans un tel contexte, comment anticiper, gérer les crises, faire société ? C’est la question qu’a posé cette sixième édition de l’Atelier des Métamorphoses organisée par Eau de Paris mardi 23 novembre, consacrée au retour des grandes peurs dans un monde d’incertitude.
Vers la dissipation des certitudes ?
Depuis les découvertes des antibiotiques et des vaccins, les sociétés ont perdu la mémoire des grandes épidémies, des peurs face aux risques et des réflexes de prévention.
Or, dans le domaine de l’eau et dans certaines parties du monde, il faut sans cesse rappeler que des menaces historiques comme le risque infectieux restent totalement d’actualité. Au-delà, les scientifiques nous alertent sur les conséquences du réchauffement climatique, avec par exemple le lien entre fonte du permafrost et libération potentielle de virus. La proximité croissante entre milieux naturels et habitats humains, liée à l’expansion urbaine ou aux tendances en faveur d’un retour de la nature en ville, représentent un nouveau risque non modélisé.
Ainsi, notre monde passe peu à peu d’une période d’apparente maîtrise des risques à la gestion des incertitudes et des craintes, amplifiées par la dérégulation de l’information en continu.
Il est urgent de penser autrement.
Anticiper, gérer et faire société face aux crises
L’Atelier des Métamorphoses #6 invite à se poser quatre grandes questions :
- Qu’est-ce que la mémoire des grandes crises sanitaires nous permettait d’anticiper en termes de gestion des maladies, des organisations et des populations ? Peut-on – et faut-il – retrouver et cultiver une mémoire des crises sanitaires et environnementales ? Comment doit-on tirer des leçons de ces crises?
- Demain, quels seront les risques sanitaires et environnementaux ? Peut-on les anticiper ?
- Comment peut-on se préparer aux crises à venir ? Comment introduire le doute et la gestion de l’incertitude dans la Res Publica ? En quoi la méthode scientifique est-elle porteuse de solution ? Comment sa mise en œuvre doit-elle être accompagnée ?
- Comment préparer nos sociétés à des risques et des crises que l’on pensait ou voulait ne plus voir ? Comment favoriser l’acceptabilité sociale du risque ? Comment gérer la peur du risque amplifiée par les réseaux sociaux et l’hyper-information ? Comment penser l’administration politique des risques aujourd’hui ?
Pour y répondre, aux côtés de Benjamin Gestin, Directeur général d’Eau de Paris, sont intervenus :
- Olivier Borraz, sociologue, directeur du Centre de sociologie des organisations (CSO). Les travaux d’Olivier Borraz portent notamment sur l’organisation du système de santé publique et sur la gestion des risques et des crises. En 2020, il a dirigé la publication d’un ouvrage collectif, écrit avec Henri Bergeron, Patrick Castel et François Dedieu, Covid-19 : une crise organisationnelle (Les Presses Sciences Po).
- Didier Sicard, Professeur émérite de médecine à l’Université de Paris, ancien chef de service de médecine interne à l’hôpital Cochin, ancien membre du Conseil d’administration de l’Institut Pasteur de Paris de 2002 à 2012, membre du Conseil d’administration de l’Institut Pasteur au Laos spécialisé dans la recherche sur les coronavirus. Il est par ailleurs Président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique qu’il a présidé de 1999 à 2008.
- Virginie Tournay, chercheuse, politologue et écrivain, est directrice de recherche en sciences du politique au CNRS, basée au Cevipof – SciencesPo. Biologiste de formation, elle analyse les rapports entre la science, les technologies de l’information et de la communication, et la société. En parallèle à ses activités professionnelles, elle écrit de la fiction politique : le roman Civilisation 0.0 (ed. Glyphe), et elle est membre de la Red Team qui imagine, depuis 2019, les risques et menaces du futur, avec des auteurs et scénaristes de science-fiction.