Assises de l’eau – Canalisateurs : 1 / Intérêt général : 0

En mai, le gouvernement a lancé des Assises de l’eau. France Eau Publique (FEP) salue cette initiative. Néanmoins, elle craint que cette mobilisation se résume à un vaste plan d’investissements dans les canalisations (2 milliards d’euros par an envisagés), occultant les autres enjeux de l’eau et de l’assainissement. L’existence de services en difficulté ne doit pas faire oublier le fait que la grande majorité des services assurent un service de qualité.

Desservant plus de 11 millions d’habitants, les gestionnaires publics de l’eau regroupés au sein de FEP rappellent l’importance d’une maîtrise d’ouvrage forte, de la protection de la ressource en eau, les enjeux d’ingénierie publique et de financement des services. FEP rappelait également la haute qualité du service assuré aux Français, avec un taux de potabilité et de disponibilité exceptionnels

 

Les atouts de la gestion publique

Pour faire face à ces défis, la gestion publique dispose de nombreux atouts :

  • Des collectivités et opérateurs publics mobilisés pour l’intérêt général et dans la durée, gage d’investissements efficients, priorisant les actions de prévention, avec une vision d’optimisation ;
  • L’argent de l’eau reste à l’eau, en toute transparence ;
  • La satisfaction et la confiance des usagers;
  • La mutualisation et coopération entre les opérateurs publics (non concurrents) est source d’économies d’échelle, d’émulation bienveillante…

Par ailleurs, les opérateurs publics sont pleinement investis dans la recherche et l’innovation dès lors qu’elles sont sources de performance et d’efficience. Cela concerne évidemment les domaines techniques traditionnels mais aussi la gouvernance, les relations avec les usagers et les parties prenantes…

 

Pour un pilotage local de la politique de l’eau et un renforcement de la maîtrise d’ouvrage

D’une durée de vie de plusieurs décennies, les ouvrages doivent être conçus pour durer : robustesse et prise en compte des politiques d’aménagement, d’urbanisme et du changement climatique. Le renouvellement des canalisations, tel que prôné par les pouvoirs publics, n’est pas le seul objectif des services d’eau et d’assainissement, qui s’attachent avant tout à assurer la qualité de l’eau potable distribuée et l’absence de pollution de l’environnement. Pour être efficients, les investissements doivent être pilotés localement, même si les services en difficulté (conjoncturelle ou structurelle) doivent être accompagnés, grâce à des mécanismes de solidarité et de regroupement.

 

Il convient de remédier à la faiblesse des capacités de maîtrise d’ouvrage de certains petits services, identifiée par les Assises, par le regroupement des services afin d’atteindre une taille critique adaptée au contexte local (et non fixée de manière unilatérale), et le renforcement des outils permettant de plus grandes mutualisations et solidarités entre ces services, qu’il s’agisse d’ingénierie publique, de commandes groupées…

Surtout, les collectivités ont besoin de stabilité et de visibilité législative et règlementaire : il n’est pas possible d’élaborer des programmations de travaux et des stratégies de financement associées sans un minimum de visibilité, notamment en matière de gouvernance.

 

Pérenniser les financements, et notamment les ressources et missions des agences de l’eau

Dubitative vis-à-vis d’un plan de financement reposant à au moins 70% sur l’emprunt, FEP exprime ses vives inquiétudes sur les risques de voir renaître ou se développer des logiques de « partenariat public-privé », qui n’aboutiraient qu’à différer l’augmentation du prix de l’eau.

Aujourd’hui, l’Etat parle d’augmenter les investissements dans les réseaux, mais la ponction sur le budget des Agence de l’eau est en totale contradiction avec cette ambition. Il faudrait à l’inverse financer les nouvelles missions des Agences et de l’AFB par de nouvelles ressources (augmentation et élargissement des redevances pour pollutions diffuses, création de nouvelles redevances sur les atteintes à la biodiversité…).

FEP insiste sur l’importance d’aider les collectivités à monter des dossiers de subvention de fonds européens, et l’obtention d’une baisse de la TVA sur l’assainissement de 10% à 5,5% ce qui permettrait, à pression sur la facture identique, de dégager des capacités d’autofinancement supplémentaires.

Petit et grand cycles de l’eau sont liés et interdépendants. La ressource en eau constitue le premier patrimoine des services publics de l’eau et de l’assainissement. Sa protection vis-à-vis des pollutions – notamment agricoles – et sa gestion quantitative au moment où les effets du changement climatique commencent à se faire sentir devrait être au premier rang des priorités, alors qu’elle n’apparaît pas dans les Assises.

L’eau ne se résume pas à des tuyaux ni à des usines. Elle mérite une vision globale, porteuse d’intérêt général.

 

Gestionnaires publics de l’eau – exemples d’innovations

Gestionnaires publics de l’eau – propositions pour les Assises de l’eau